L’Empire du Chaos se prépare à de nouveaux feux d’artifice en 2016
Les chiffres de Satan, Lucifer, du diable ,du Nouvel Ordre Mondial (rajouté par la rédaction de l'EDM)
L’Empire du Chaos se prépare à de nouveaux feux d’artifice en 2016
Par Pepe Escobar
Dans
son ouvrage fondamental La chute de Rome – Fin d’une Civilisation,
Bryan Ward-Perkins écrit : « Les Romains avant la chute étaient eux
aussi convaincus que nous le sommes, nous aujourd’hui, que le monde
resterait, pour l’essentiel, tel qu’il était. Ils avaient tort. À
nous de ne pas répéter leur erreur et de ne pas nous bercer d’une
fallacieuse assurance. »
L’Empire
du Chaos, aujourd’hui, n’est pas coupable d’une fallacieuse
assurance. Ses moteurs sont l’arrogance et la peur. La question centrale
depuis le début de la Guerre froide fut de savoir qui contrôlerait les grands
réseaux commerciaux d’Eurasie, l’épicentre du monde (heartland)
selon Sir Halford John Mackinder (1861–1947), le Père de la géopolitique.
On
peut affirmer qu’en ce qui concerne l’Empire du Chaos, la partie a
vraiment débuté avec le coup d’État soutenu par la CIA en 1953 contre le
régime iranien, qui fut la première incursion des États-Unis dans les fameuses
Routes de la Soie qui sillonnaient l’Eurasie depuis des siècles, et qu’ils
décidèrent de conquérir.
À
peine soixante ans plus tard, il apparaît clairement que la Route de la Soie du
XXIe siècle ne sera pas américaine, mais bien chinoise, comme les précédentes.
La
politique qu’entreprend Pékin de construire ce qu’il appelle Une
Ceinture, une Route s’inscrit dans le conflit de ce XXIe siècle qui
oppose l’Empire déclinant au processus d’intégration eurasienne. La
constante expansion de l’Otan, ainsi que l’obsession qu’a
l’Empire de provoquer un conflit armé en mer de Chine méridionale, sont
des points de friction sous-jacents, mais pour autant essentiels à ce conflit.
Pour
résumer l’analyse des acteurs du partenariat stratégique
Pékin–Moscou, les élites oligarchiques, qui sont réellement aux manettes
de l’Empire du Chaos, ont comme priorité l’encerclement de
l’Eurasie, conscientes qu’elles sont de leur exclusion de ce
processus d’intégration basé sur les échanges commerciaux et des liens de
communication sophistiqués.
Pékin
et Moscou démasquent chacune des provocations qui leur sont adressées, couplées
à des tentatives continuelles de diabolisation dans les médias. Mais Moscou et
Pékin ne se laisseront pas piéger, car ils jouent tous deux une partie
d’échecs de longue haleine.
Le
président russe Vladimir Poutine s’applique, de façon très diplomatique,
à traiter l’Occident comme partenaire. Mais il est conscient, comme tous
ceux qui savent en Chine, que l’Occident n’est pas réellement un
partenaire. Certainement pas à la suite des 78 jours de bombardement de Belgrade
en 1999, ni du bombardement délibéré de l’ambassade de Chine dans cette
même ville. Pas pendant que l’expansion de l’Otan se poursuit. Pas
après une nouvelle tentative de recréer la situation du Kosovo en soutenant un
coup d’État illégal à Kiev. Pas après la manipulation à la baisse des
prix du pétrole par les pays du Golfe, clients des États-Unis. Ni après les
sanctions imposées à la Russie par les États-Unis et l’Union européenne.
Pas plus qu’après que Wall Street eut provoqué la chute du rouble. Ni
suite à l’effondrement des actions prioritaires (A-shares) chinoises,
lancé par des acteurs mandatés par Wall Street. Pas après les multiples
provocations militaires en mer de Chine méridionale. Ni, enfin, après la
destruction du Soukhoi-24 russe en Syrie par un chasseur turc.
La paix ne tient qu’à un fil
Un
retour en arrière sur les évènements qui ont mené à l’attaque sur le
Soukhoi-24 russe est instructif à plusieurs égards. Obama a rencontré Poutine.
Peu après, Poutine a rencontré Khamenei. Le sultan Erdogan avait de quoi
s’inquiéter. En effet, une solide alliance russo-iranienne était en train
de se dessiner à Téhéran. La destruction du Soukhoi-24 a eu lieu le lendemain.
Hollande
a rencontré Obama. Puis Hollande a rencontré Poutine. Erdogan devait penser
qu’il venait de créer le prétexte idéal pour faire entrer l’Otan en
guerre, qui pouvait être déclarée en vertu de l’Article 5 de la Charte de
l’alliance. Ce n’est pas un hasard si l’État en déliquescence
qu’est l’Ukraine a été le seul pays à s’empresser de soutenir
l’agression turque contre le chasseur russe. Sauf que l’Otan
s’est rétractée, probablement terrifiée ; l’Empire
n’était pas préparé à l’éventualité d’un conflit nucléaire.
Du
moins pas encore. Napoléon avait compris que ce sont de micro-évènements qui
façonnent l’Histoire.
Tant
que cette Guerre froide 2.0 perdure, nous étions, et resterons, à un fil du
conflit nucléaire.
Quelles
que soient les évolutions du prétendu processus de paix en Syrie, la guerre par
procuration que se livrent Washington et Moscou continuera, parce que
c’est la grille de lecture que partagent tous les think tanks qui
influencent la politique étrangère arrogante de l’Empire.
Sur
tout l’échiquier politique de l‘Empire, depuis les néoconservateurs
messianiques jusqu’aux néolibéraux conservateurs, la seule issue
désirable à ce conflit est le dépeçage de la Syrie. Le système Erdogan
engloutirait le Nord, Israël engloutirait le Plateau du Golan riche en
hydrocarbures, et les agents de la Maison des Saoud engloutiraient les déserts
orientaux.
Par
son intervention militaire, la Russie a littéralement fait voler en éclats ce
plan détaillé, parce que l’étape suivante à ce démembrement de
l’État syrien aurait vu entrer en scène une coalition rassemblant Ankara,
Riyad et Washington (qui auarit dirigé en coulisses), dont l’objectif
aurait été d’ouvrir une autoroute du djihad en direction du nord vers le
Caucase, l’Asie centrale et le Xinjiang chinois (on dénombre déjà au
moins 300 Ouïghours chinois combattant sous la bannière Daesh). Comme toutes
les tentatives de l’Empire de s’incruster dans le processus
d’intégration eurasiatique ont échoué, quoi de mieux que d’essayer
de saborder cette intégration en lui infusant le poison de l’islamisme
radical ?
Du
côté chinois, quelles que soient les provocations de l’Empire du Chaos,
elles ne parviendront pas à faire dévier Pékin de son objectif en mer de Chine
méridionale, ce vaste bassin regorgeant de ressources en hydrocarbures
inexplorées constituant un corridor naval sur le flanc oriental de la Chine.
Pékin poursuit inexorablement sa transformation, à l’horizon 2020, en une
formidable puissance navale (haiyang qiangguo).
Quand
bien même Washington fera pleuvoir 250 millions de dollars d’aide
militaire au Vietnam, aux Philippines et en Indonésie dans les deux prochaines
années, cela ne servira pas à grand-chose. Toutes ces manigances militaires de
l’Empire devront prendre en compte, par exemple, le missile balistique
hypersonique DF-21D tueur de porte-avions, d’une portée maximale de 2 500
kilomètres et capable de transporter une ogive nucléaire.
Sur
le front économique, la relation Washington-Pékin restera le terrain privilégié
du conflit par agents interposés. Washington pousse son Accord de partenariat
transpacifique (de son acronyme anglo-saxon TPP), tel une sorte de pivot vers
l’Asie de l’Otan. Cela reste pour le moment un effort vain car 12
États membres doivent encore le ratifier, et pas des moindres, le Congrès
américain y étant particulièrement hostile.
Face
à cette stratégie impériale unidimensionnelle, le président chinois Xi Jinping
élabore, de son côté, une stratégie complexe à trois volets :
1.La parade au TPP
qu’est la Zone de libre-échange d’Asie Pacifique (FTAAP)2.La très ambitieuse politique Une ceinture, une Route
3.La parade chinoise à la Banque asiatique de développement (ADB, entité contrôlée par la Banque mondiale, les États-Unis et le Japon) qu’est la nouvelle Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures (AIIB), dotée de suffisamment de moyens pour financer une avalanche de projets dans la région.
Pour
l’Asie du Sud-Est par exemple, les chiffres parlent d’eux-mêmes.
L’an dernier, la Chine a été le principal partenaire de l’ASEAN
(Association des nations d’Asie du Sud-Est), pour un montant de 367
milliards de dollars. Ces chiffres ne feront qu’augmenter au fur et à
mesure que la politique Une Ceinture, une Route prendra du galon, et qui est
destinée à absorber 200 milliards de dollars d’investissements chinois
d’ici à 2018.
Une relecture d’Au cœur des ténèbres
Les
perspectives pour l’Europe sont maussades. Le chercheur franco-iranien
Farhad Khosrokhavar est l’un des rares analystes à avoir cerné le
cœur du problème. Selon lui, une armée réserviste de djihadistes sur le
territoire européen continuera d’être alimentée en recrues par les
bataillons de jeunes exclus de quartiers déshérités. Et rien n’indique
que les dirigeants néolibéraux conservateurs de l’Union européenne vont
mettre en place des politiques socio-économiques reposant sur une nouvelle forme
de socialisation, et visant à extraire cette jeunesse désœuvrée de ses
ghettos.
Ainsi,
la seule échappatoire pour ces jeunes restera une version pathogène du
djihadisme salafiste, prêché par des profiteurs manipulateurs, qui leur
vendront, à l’aide de beaux discours, un ersatz de résistance, et qui est
la seule idéologie alternative sur le marché de la pensée unique. Khosrokhavar
définit cette population comme étant une néo-oumma, une communauté en
effervescence qui n’a jamais existé historiquement, mais qui invite
aujourd’hui ouvertement tout jeune Européen traversant une crise
identitaire, qu’il soit musulman ou d’une autre confession, à la
rejoindre.
Parallèlement,
après près de quinze ans de guerre inlassable menée par les néoconservateurs
américains contre des États indépendants du Moyen-Orient, le Pentagone va
accélérer l’expansion sans limites de ses bases militaires existantes, de
Djibouti, dans la corne de l’Afrique, à Irbil dans le Kurdistan irakien,
pour leur faire prendre progressivement la forme de nœuds logistiques
militaires.
De
l’Afrique subsaharienne à l’Asie du Sud-Est, attendons-nous à une
recrudescence de l’apparition de ces nœuds logistiques militaires,
ou des membres des forces spéciales de l’Empire seront nourris, logés et
blanchis.
Cette
tendance à l’expansion de ces nœuds logistiques militaires a été
qualifiée d’essentielle par le dirigeant du Pentagone et porte-voix de l’Empire
de la pleurniche Ash Carter : Parce qu’on ne peut pas prédire le
futur, ces nœuds logistiques militaires, de Moron en Espagne, à Jalalabad
en Afghanistan, serviront de bases avancées pour répondre à toutes sortes de
crises, terroristes ou autres. Ces bases nous permettront d’apporter une
réponse unilatérale en cas de crises, d’opérations antiterroristes ou de
frappes sur des cibles de haute importance.
Tout
est écrit noir sur blanc : nous avons devant nous le Messianistan en
action contre quiconque oserait défier les diktats de l’Empire.
De
l’Ukraine à la Syrie, et à travers tout le Moyen-Orient et
l’Afrique du Nord, la guerre par agents interposés que se livrent
Washington et Moscou, et dont les enjeux vont en grandissant, n’ira pas
en s’apaisant.
Tout
comme la panique de l’Empire face à l’ascension chinoise
d’ailleurs. Au fur et à mesure que les cartes du jeu géopolitique sont
battues et redistribuées, que la Russie fournit les puissances eurasiatiques
que sont l’Iran, la Chine et l’Inde avec des systèmes de défense
balistique supérieurs à ce que l’Occident positionne en face, nous allons
devoir nous habituer à cette nouvelle Guerre froide 2.0 que vont se livrer
Washington et Pékin-Moscou.
Je
vous laisse en compagnie de Joseph Conrad, qui écrivait dans Au cœur des
ténèbres :
Il
y a une corruption funeste, une saveur de mort dans le mensonge (…).
Arracher leur trésor aux entrailles de la terre, tel était leur désir, sans
plus d’intention morale pour les soutenir que n’en auraient des
cambrioleurs de coffre-fort (…). Nous ne pouvions pas comprendre parce
que nous étions trop loin et que nous ne nous rappelions plus, parce que nous
voyagions dans la nuit des premiers âges, de ces âges disparus sans laisser à
peine un signe et nul souvenir.
Pepe Escobar
Le 24 décembre 2015 – Source : Russia Today
Frédéric BERGER
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire