Posted: 11 Mar 2014 02:21 AM PDT
Par Chérif Abdedaïm,le 11 mars 2014
Apparemment, on assiste à un nouveau feuilleton d’un Serial killer politique. « Washington peut-il renverser trois gouvernements à la fois ? » Telle est la question que se pose le journaliste Thierry Meyssan dans un récent article.
« Ukraine, Venezuela, Syrie… Dans les trois cas, la narration US repose sur les mêmes principes : accuser les gouvernements d’avoir tué leurs propres citoyens, qualifier les opposants de « démocratiques », prendre des sanctions contre les « meurtriers », et en définitive opérer des coups d’Etat. Chaque fois, le mouvement débute par une manifestation au cours de laquelle des opposants pacifiques sont tués, et où les deux camps s’accusent des violences. En réalité des forces spéciales US ou de l’OTAN, placées sur les toits, tirent à la fois sur la foule et sur la police. Ce fut le cas à Deraa (Syrie) en 2011, à Kiev (Ukraine) et à Caracas (Venezuela) cette semaine… , »avance le journaliste avant de renchérir: « Washington tente ainsi de montrer au monde qu’il est toujours le maître. Pour être plus sûr de lui-même, il a lancé les opérations ukrainiennes et vénézuéliennes durant les Jeux Olympiques de Sotchi. Il était certain que la Russie ne bougerait pas de peur de voir sa fête troublée par des attentats islamistes. Mais Sotchi a pris fin ce week-end. C’est désormais au tour de Moscou de jouer. »
Très optimiste… En fait, les Jeux ne sont pas vraiment terminés : il y a encore les « paralympiques », du 7 au 16 mars. Donc, pour Poutine, trois semaines de sursis… à l’issue desquelles il n’aura plus à aborder un sujet sorti de l’actualité. Sauf, bien sûr, si l’est et le sud de l’Ukraine se soulèvent ce qui n’est guère probable à en juger par les réactions deux jours après le putsch.
Il semblerait que le Parti des régions se disloque : il lui est difficile d’être plus « royaliste » que le « roi » déchu, surtout si un certain nombre de ses députés ont été achetés. Il y a bien quelques protestations contre le coup d’Etat, mais elles reprochent surtout aux putschistes de « ne pas avoir respecté l’accord du 21 février conclu à l’initiative de l’UE », « accord » suite auquel Ianoukovitch avait « fait des concessions » balayées le lendemain. A Kharkov, un forum auquel ont pris part 3.000 délégués du sud et de l’est ainsi que des représentants de la Russie, a accouché d’une « résolution » pas très convaincante. Ce n’est pas cela qui va changer quoi que ce soit à la situation…
En Russie, Poutine se tait mais son ministre des Affaires étrangères déclare : « Nous appelons instamment tous les acteurs impliqués dans la crise en Ukraine à faire preuve d’un maximum de responsabilité, à ne pas laisser la situation s’aggraver davantage, à la ramener dans le cadre de la légalité et à réprimer sévèrement les extrémistes avides de pouvoir… » Qui sont ces extrémistes et qui devrait les réprimer ? Mystère… En tout cas, pas un mot pour appeler les choses par leur nom, pas un mot pour dénoncer le coup d’Etat, pas un mot en faveur du président élu…
Pour Dimitri Medvedev, « la légitimité de toute une série d’organes du pouvoir en Ukraine suscite de sérieux doutes » : c’est tout ce qu’on voudra mais pas une condamnation. Ce qui chiffonne le Premier ministre russe, c’est que « des gens qui se baladent dans Kiev avec des masques noirs et des kalachnikovs sont le gouvernement ». Autrement dit, et là Medvedev rejoint Lavrov, dès que les Timochenko, Klitch et Yats auront mis en place un « gouvernement » sans masques noirs ni kalach en bandoulière, tout sera parfait. Le problème, ce sont les gangsters qui écument les rues, pas ceux qui se sont emparés du Parlement et de l’Etat.
Le 25 février, Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères, déclare sans rigoler (cité par RIA Novosti) : « La Russie ne s’ingère pas dans la situation politique en Ukraine et espère que ses partenaires internationaux suivront la même logique.. » Quelques instants plus tard, dans la même conférence de presse, il ajoute : « L’élection présidentielle en Ukraine doit suivre la réforme constitutionnelle et non la précéder… » Ce qui revient à dire que la Russie accepte implicitement le coup d’Etat.
Pagaille accélérée, les analystes de tous bords tentent de séparer la graine de l’ivraie. Les analyses affluent à une cadence vertigineuse. Le journaliste italien Manlio Dinucci nous explique « comment l’OTAN a creusé sous l’Ukraine ». Dans un article intitulé » Ukraine : l’épuration », Xavier Moreau rapporte : « A Lvov, les Berkout (membres des unités d’élite du ministère de l’Intérieur) ont été contraints par le Pravy Sektor de demander pardon à genoux, devant un « rassemblement de citoyens ». La maison du fils du président du parti communiste a été incendiée et les élus craignent pour leur famille. Pravy Sektor s’autorise à violer les domiciles de ceux qui sont jugés « ennemis de la nation ». Les milices se trouvent à l’intérieur même du Parlement et en contrôlent étroitement l’activité… »
« Le « gouvernement » actuel, formé par les proches de Timochenko, s’empresse d’accéder à toutes les demandes des extrémistes de Svoboda (« Liberté », autre groupe fasciste) . Ces derniers, ainsi que Pravy Sektor, savent que les prochaines élections les ramèneront à leur importance réelle sur l’échiquier politique ukrainien, c’est-à-dire pas grand-chose. Leur stratégie est désormais de se constituer en « ‘comité de salut public » et de faire régner leur « ordre » à l’intérieur même de la Rada (Parlement). Catherine Ashton (« ministre » des Affaires étrangères de l’UE – elle a autant de « légitimité » que son homologue ukrainien] n’a visiblement rien trouvé à y redire. »
« A Kiev, la situation est précaire et les habitants armés sont de plus en plus nombreux et le sont ouvertement. Désormais un masque, un brassard et une arme vous donnent le droit de vous déclarer du Pravy Sektor, et par conséquent, de pressurer qui vous voulez dans la rue. Cette situation fait le bonheur des sociétés de sécurité, qui sont désormais systématiquement utilisées par les hommes d’affaires, et à qui des quartiers entiers sont confiés par les habitants effrayés. Les retraits d’argent liquide se généralisent et la fuite des capitaux atteint des sommets. La police a totalement déserté les rues. En plus d’avoir le monopole de la violence, Svoboda a obtenu le poste de procureur général, ce qui lui permettra d’inculper tous les citoyens ukrainiens qui refusent de se soumettre, et de renforcer son « comité de salut public ». »
« Les radicaux agissent essentiellement à Kiev et dans l’ouest. A l’est et au sud, ils sont soit absents, soit ils occupent des bâtiments administratifs sans que cela gêne la vie des populations. Les lois ségrégationnistes qui ont été prises sous la contrainte par la Rada ( interdiction de la langue russe) ne peuvent de toute façon pas être appliquées pour l’instant… »
Après l’acte ukranien, le rideau se lève sur la Crimée. Le 27 février, la situation est confuse. Après plusieurs heures de manifestations antagonistes de partisans et d’adversaires du putsch, un groupe « inconnu » envahit le Parlement régional de Simféropol. Le président de cette assemblée, qui avait prétendu une semaine plus tôt que la Crimée réclamerait l’indépendance en cas de coup d’Etat, déclare à présent que la question ne se pose pas. (De toute manière l’indépendance ne se réclame pas : elle se prend, elle se proclame.)
Le lendemain, il semblerait que la population, majoritairement russe, commence à bouger. Les deux aéroports (Simféropol et Sébastopol) seraient contrôlés par des groupes qui veulent empêcher la venue des commandos armés de la racaille de Kiev. L’accès routier est également surveillé, ce qui est d’autant plus facile qu’il n’y a que deux points de passage depuis l’Ukraine. Officiellement, ni le gouvernement ni l’armée russes ne sont actifs , même si la propagande occidentale accuse déjà Moscou d’envahir la Crimée.
A Rostov-sur-le-Don, en Russie, près de la frontière ukrainienne, première apparition publique de Ianoukovitch lors d’une conférence de presse. Le président renversé a mis une semaine pour sortir de son coma, il aurait mieux fait d’y rester. Sa prestation faiblarde n’est pas de nature à encourager ses partisans – au cas où il en aurait encore, ce qui est douteux. Comme s’il s’agissait d’une simple crise ministérielle, Ianoukovitch demande le respect de « l’accord » conclu avec l’opposition le 21 février sur « médiation » de l’UE ; il n’a toujours pas compris qu’il s’agissait d’un piège et que « l’arrangement » en question était destiné à endormir sa méfiance. Au lieu d’appeler à la résistance, Il appelle au dialogue et à l’unité des Ukrainiens – surtout pas de sécession (ni en Crimée ni ailleurs). Détail presque humoristique : Ianoukovitch se dit « étonné du silence de Poutine » qui n’a pas encore daigné le recevoir…
le 1er mars, le Premier ministre de la République autonome de Crimée, Sergueï Aksenov, prend le commandement temporaire de toutes les unités militaires et forces de sécurité locales et appelle la Russie à aider la Crimée à assurer la paix. (On sait que l’armée « nationale » ukrainienne est « neutre », c’est-à-dire soit pro-putsch soit « en vacances ».)
A Moscou, Poutine semble enfin abandonner sa politique de non-intervention et demande au Conseil de la Fédération (chambre haute du Parlement russe) d’autoriser l’envoi de troupes en Ukraine pour y protéger les citoyens russes; le Conseil de la Fédération donne son accord, de même d’ailleurs que le président légitime ukrainien, Victor Ianoukovitch.
Il est difficile de dire si de nouvelles troupes russes sont déjà en Crimée et combien (en plus du contingent habituellement sur place à Sébastopol). Si l’on en croit les Occidentaux, le nombre de soldats grossit à vue d’œil (2.000 le matin du 1er mars, 6.000 l’après-midi, 15.000 le soir). Ces chiffres correspondent-ils à la réalité ou sont-ils l’effet de la propagande antirusse ?… Toujours est-il que la campagne anti-Poutine bat son plein, animée par les USA et l’UE, et relayée par les gangsters du pseudo-gouvernement de Kiev. Vitali Klitchko, lui, lance un appel à la mobilisation générale comme en 1914. (Si l’on mobilise vraiment, il prendra le premier avion pour Berlin.)
Il est clair que le rattachement par Khrouchtchev, en 1954, de la Crimée russe à l’Ukraine a des conséquences catastrophiques 60 ans plus tard. Une forte majorité de citoyens de Crimée souhaite l’annulation de cette mesure arbitraire. En fait, la chose aurait dû se produire dès 1992. Malheureusement, au lieu de cela, la Russie du président alcoolique Elstine a conclu avec les Etats-Unis, en 1994, un « accord » souvent invoqué ces jours-ci, dans lequel elle garantit l’indépendance et l’intégrité territoriale de l’Ukraine en échange de l’abandon par ce pays de son arsenal nucléaire hérité de l’époque soviétique.
Réveillés par les événements de Crimée, les habitants de Kharkov, Donetsk, Odessa et quelques autres villes de l’est et du sud de l’Ukraine organisent des manifestations anti-coup d’Etat. Des pro-putschistes qui tentaient de s’y opposer se font rosser. Tout cela est encourageant, mais il est clair que si Ianoukovitch était sur place au lieu de se planquer en Russie, la résistance aurait plus de poids.
En Crimée, le camp russe semble avoir le contrôle de la situation. Les pro-putsch, qu’ils soient civils ou militaires, ont pour ainsi dire disparu. Sauf intervention militaire directe de l’OTAN ou volte-face de Poutine, on imagine mal que les voyous de Kiev puissent s’imposer ici. Un référendum sera organisé le 30 mars pour décider du « sort » de la Crimée. Mais vu que la question posée exclut par avance de quitter l’Ukraine et de modifier les traités et accords existants, ce référendum risque de ne mener à rien.
En attendant, à New York, à la demande des Occidentaux (qui interviennent depuis des mois en Ukraine), « le Conseil de Sécurité examine les mesures à prendre face à l’intervention russe ». L’ambassadeur ukrainien, convié à la réunion après qu’on l’ait « retourné », récite docilement les accusations antirusses formulées par ses maîtres. Mais Moscou, avec son droit de veto, n’a rien à craindre de ce côté-là.
Auparavant, Poutine avait averti Obama : « En cas de propagation de la violence dans l’est et le sud de l’Ukraine, la Russie se réserve le droit de défendre ses intérêts ainsi que ceux de la population russophone dans ces régions. » Autrement dit, l’intervention que l’on reproche aux Russes n’a pas encore commencé, on n’a encore rien vu… Nul ne sait pour le moment si les bellicistes américains qui remplissent les écrans de CNN seront suivis et s’ils pourront déclencher la nouvelle guerre de 2014 qu’ils appellent de tous leurs vœux.
Mais à entendre les récentes déclarations du président des chefs d’état-major américain Martin Dempsey : « L’armée américaine est prête à remplir ses obligations envers l’OTAN, si la crise en Ukraine nécessite cela » En clair, le général a également ajouté que, à son avis, si l’on permet la Russie d’envahir un Etat souverain sous le prétexte de protéger les personnes d’origine russe en Ukraine, toute l’Europe de l’Est et les Balkans seraient sous la menace de déstabilisation.
Quelle fausse dévotion !
Chérif Abdedaïm, http://lnr-dz.com/index.php? page=rubrique&rub=3&archives= 20140308
Apparemment, on assiste à un nouveau feuilleton d’un Serial killer politique. « Washington peut-il renverser trois gouvernements à la fois ? » Telle est la question que se pose le journaliste Thierry Meyssan dans un récent article.
« Ukraine, Venezuela, Syrie… Dans les trois cas, la narration US repose sur les mêmes principes : accuser les gouvernements d’avoir tué leurs propres citoyens, qualifier les opposants de « démocratiques », prendre des sanctions contre les « meurtriers », et en définitive opérer des coups d’Etat. Chaque fois, le mouvement débute par une manifestation au cours de laquelle des opposants pacifiques sont tués, et où les deux camps s’accusent des violences. En réalité des forces spéciales US ou de l’OTAN, placées sur les toits, tirent à la fois sur la foule et sur la police. Ce fut le cas à Deraa (Syrie) en 2011, à Kiev (Ukraine) et à Caracas (Venezuela) cette semaine… , »avance le journaliste avant de renchérir: « Washington tente ainsi de montrer au monde qu’il est toujours le maître. Pour être plus sûr de lui-même, il a lancé les opérations ukrainiennes et vénézuéliennes durant les Jeux Olympiques de Sotchi. Il était certain que la Russie ne bougerait pas de peur de voir sa fête troublée par des attentats islamistes. Mais Sotchi a pris fin ce week-end. C’est désormais au tour de Moscou de jouer. »
Très optimiste… En fait, les Jeux ne sont pas vraiment terminés : il y a encore les « paralympiques », du 7 au 16 mars. Donc, pour Poutine, trois semaines de sursis… à l’issue desquelles il n’aura plus à aborder un sujet sorti de l’actualité. Sauf, bien sûr, si l’est et le sud de l’Ukraine se soulèvent ce qui n’est guère probable à en juger par les réactions deux jours après le putsch.
Il semblerait que le Parti des régions se disloque : il lui est difficile d’être plus « royaliste » que le « roi » déchu, surtout si un certain nombre de ses députés ont été achetés. Il y a bien quelques protestations contre le coup d’Etat, mais elles reprochent surtout aux putschistes de « ne pas avoir respecté l’accord du 21 février conclu à l’initiative de l’UE », « accord » suite auquel Ianoukovitch avait « fait des concessions » balayées le lendemain. A Kharkov, un forum auquel ont pris part 3.000 délégués du sud et de l’est ainsi que des représentants de la Russie, a accouché d’une « résolution » pas très convaincante. Ce n’est pas cela qui va changer quoi que ce soit à la situation…
En Russie, Poutine se tait mais son ministre des Affaires étrangères déclare : « Nous appelons instamment tous les acteurs impliqués dans la crise en Ukraine à faire preuve d’un maximum de responsabilité, à ne pas laisser la situation s’aggraver davantage, à la ramener dans le cadre de la légalité et à réprimer sévèrement les extrémistes avides de pouvoir… » Qui sont ces extrémistes et qui devrait les réprimer ? Mystère… En tout cas, pas un mot pour appeler les choses par leur nom, pas un mot pour dénoncer le coup d’Etat, pas un mot en faveur du président élu…
Pour Dimitri Medvedev, « la légitimité de toute une série d’organes du pouvoir en Ukraine suscite de sérieux doutes » : c’est tout ce qu’on voudra mais pas une condamnation. Ce qui chiffonne le Premier ministre russe, c’est que « des gens qui se baladent dans Kiev avec des masques noirs et des kalachnikovs sont le gouvernement ». Autrement dit, et là Medvedev rejoint Lavrov, dès que les Timochenko, Klitch et Yats auront mis en place un « gouvernement » sans masques noirs ni kalach en bandoulière, tout sera parfait. Le problème, ce sont les gangsters qui écument les rues, pas ceux qui se sont emparés du Parlement et de l’Etat.
Le 25 février, Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères, déclare sans rigoler (cité par RIA Novosti) : « La Russie ne s’ingère pas dans la situation politique en Ukraine et espère que ses partenaires internationaux suivront la même logique.. » Quelques instants plus tard, dans la même conférence de presse, il ajoute : « L’élection présidentielle en Ukraine doit suivre la réforme constitutionnelle et non la précéder… » Ce qui revient à dire que la Russie accepte implicitement le coup d’Etat.
Pagaille accélérée, les analystes de tous bords tentent de séparer la graine de l’ivraie. Les analyses affluent à une cadence vertigineuse. Le journaliste italien Manlio Dinucci nous explique « comment l’OTAN a creusé sous l’Ukraine ». Dans un article intitulé » Ukraine : l’épuration », Xavier Moreau rapporte : « A Lvov, les Berkout (membres des unités d’élite du ministère de l’Intérieur) ont été contraints par le Pravy Sektor de demander pardon à genoux, devant un « rassemblement de citoyens ». La maison du fils du président du parti communiste a été incendiée et les élus craignent pour leur famille. Pravy Sektor s’autorise à violer les domiciles de ceux qui sont jugés « ennemis de la nation ». Les milices se trouvent à l’intérieur même du Parlement et en contrôlent étroitement l’activité… »
« Le « gouvernement » actuel, formé par les proches de Timochenko, s’empresse d’accéder à toutes les demandes des extrémistes de Svoboda (« Liberté », autre groupe fasciste) . Ces derniers, ainsi que Pravy Sektor, savent que les prochaines élections les ramèneront à leur importance réelle sur l’échiquier politique ukrainien, c’est-à-dire pas grand-chose. Leur stratégie est désormais de se constituer en « ‘comité de salut public » et de faire régner leur « ordre » à l’intérieur même de la Rada (Parlement). Catherine Ashton (« ministre » des Affaires étrangères de l’UE – elle a autant de « légitimité » que son homologue ukrainien] n’a visiblement rien trouvé à y redire. »
« A Kiev, la situation est précaire et les habitants armés sont de plus en plus nombreux et le sont ouvertement. Désormais un masque, un brassard et une arme vous donnent le droit de vous déclarer du Pravy Sektor, et par conséquent, de pressurer qui vous voulez dans la rue. Cette situation fait le bonheur des sociétés de sécurité, qui sont désormais systématiquement utilisées par les hommes d’affaires, et à qui des quartiers entiers sont confiés par les habitants effrayés. Les retraits d’argent liquide se généralisent et la fuite des capitaux atteint des sommets. La police a totalement déserté les rues. En plus d’avoir le monopole de la violence, Svoboda a obtenu le poste de procureur général, ce qui lui permettra d’inculper tous les citoyens ukrainiens qui refusent de se soumettre, et de renforcer son « comité de salut public ». »
« Les radicaux agissent essentiellement à Kiev et dans l’ouest. A l’est et au sud, ils sont soit absents, soit ils occupent des bâtiments administratifs sans que cela gêne la vie des populations. Les lois ségrégationnistes qui ont été prises sous la contrainte par la Rada ( interdiction de la langue russe) ne peuvent de toute façon pas être appliquées pour l’instant… »
Après l’acte ukranien, le rideau se lève sur la Crimée. Le 27 février, la situation est confuse. Après plusieurs heures de manifestations antagonistes de partisans et d’adversaires du putsch, un groupe « inconnu » envahit le Parlement régional de Simféropol. Le président de cette assemblée, qui avait prétendu une semaine plus tôt que la Crimée réclamerait l’indépendance en cas de coup d’Etat, déclare à présent que la question ne se pose pas. (De toute manière l’indépendance ne se réclame pas : elle se prend, elle se proclame.)
Le lendemain, il semblerait que la population, majoritairement russe, commence à bouger. Les deux aéroports (Simféropol et Sébastopol) seraient contrôlés par des groupes qui veulent empêcher la venue des commandos armés de la racaille de Kiev. L’accès routier est également surveillé, ce qui est d’autant plus facile qu’il n’y a que deux points de passage depuis l’Ukraine. Officiellement, ni le gouvernement ni l’armée russes ne sont actifs , même si la propagande occidentale accuse déjà Moscou d’envahir la Crimée.
A Rostov-sur-le-Don, en Russie, près de la frontière ukrainienne, première apparition publique de Ianoukovitch lors d’une conférence de presse. Le président renversé a mis une semaine pour sortir de son coma, il aurait mieux fait d’y rester. Sa prestation faiblarde n’est pas de nature à encourager ses partisans – au cas où il en aurait encore, ce qui est douteux. Comme s’il s’agissait d’une simple crise ministérielle, Ianoukovitch demande le respect de « l’accord » conclu avec l’opposition le 21 février sur « médiation » de l’UE ; il n’a toujours pas compris qu’il s’agissait d’un piège et que « l’arrangement » en question était destiné à endormir sa méfiance. Au lieu d’appeler à la résistance, Il appelle au dialogue et à l’unité des Ukrainiens – surtout pas de sécession (ni en Crimée ni ailleurs). Détail presque humoristique : Ianoukovitch se dit « étonné du silence de Poutine » qui n’a pas encore daigné le recevoir…
le 1er mars, le Premier ministre de la République autonome de Crimée, Sergueï Aksenov, prend le commandement temporaire de toutes les unités militaires et forces de sécurité locales et appelle la Russie à aider la Crimée à assurer la paix. (On sait que l’armée « nationale » ukrainienne est « neutre », c’est-à-dire soit pro-putsch soit « en vacances ».)
A Moscou, Poutine semble enfin abandonner sa politique de non-intervention et demande au Conseil de la Fédération (chambre haute du Parlement russe) d’autoriser l’envoi de troupes en Ukraine pour y protéger les citoyens russes; le Conseil de la Fédération donne son accord, de même d’ailleurs que le président légitime ukrainien, Victor Ianoukovitch.
Il est difficile de dire si de nouvelles troupes russes sont déjà en Crimée et combien (en plus du contingent habituellement sur place à Sébastopol). Si l’on en croit les Occidentaux, le nombre de soldats grossit à vue d’œil (2.000 le matin du 1er mars, 6.000 l’après-midi, 15.000 le soir). Ces chiffres correspondent-ils à la réalité ou sont-ils l’effet de la propagande antirusse ?… Toujours est-il que la campagne anti-Poutine bat son plein, animée par les USA et l’UE, et relayée par les gangsters du pseudo-gouvernement de Kiev. Vitali Klitchko, lui, lance un appel à la mobilisation générale comme en 1914. (Si l’on mobilise vraiment, il prendra le premier avion pour Berlin.)
Il est clair que le rattachement par Khrouchtchev, en 1954, de la Crimée russe à l’Ukraine a des conséquences catastrophiques 60 ans plus tard. Une forte majorité de citoyens de Crimée souhaite l’annulation de cette mesure arbitraire. En fait, la chose aurait dû se produire dès 1992. Malheureusement, au lieu de cela, la Russie du président alcoolique Elstine a conclu avec les Etats-Unis, en 1994, un « accord » souvent invoqué ces jours-ci, dans lequel elle garantit l’indépendance et l’intégrité territoriale de l’Ukraine en échange de l’abandon par ce pays de son arsenal nucléaire hérité de l’époque soviétique.
Réveillés par les événements de Crimée, les habitants de Kharkov, Donetsk, Odessa et quelques autres villes de l’est et du sud de l’Ukraine organisent des manifestations anti-coup d’Etat. Des pro-putschistes qui tentaient de s’y opposer se font rosser. Tout cela est encourageant, mais il est clair que si Ianoukovitch était sur place au lieu de se planquer en Russie, la résistance aurait plus de poids.
En Crimée, le camp russe semble avoir le contrôle de la situation. Les pro-putsch, qu’ils soient civils ou militaires, ont pour ainsi dire disparu. Sauf intervention militaire directe de l’OTAN ou volte-face de Poutine, on imagine mal que les voyous de Kiev puissent s’imposer ici. Un référendum sera organisé le 30 mars pour décider du « sort » de la Crimée. Mais vu que la question posée exclut par avance de quitter l’Ukraine et de modifier les traités et accords existants, ce référendum risque de ne mener à rien.
En attendant, à New York, à la demande des Occidentaux (qui interviennent depuis des mois en Ukraine), « le Conseil de Sécurité examine les mesures à prendre face à l’intervention russe ». L’ambassadeur ukrainien, convié à la réunion après qu’on l’ait « retourné », récite docilement les accusations antirusses formulées par ses maîtres. Mais Moscou, avec son droit de veto, n’a rien à craindre de ce côté-là.
Auparavant, Poutine avait averti Obama : « En cas de propagation de la violence dans l’est et le sud de l’Ukraine, la Russie se réserve le droit de défendre ses intérêts ainsi que ceux de la population russophone dans ces régions. » Autrement dit, l’intervention que l’on reproche aux Russes n’a pas encore commencé, on n’a encore rien vu… Nul ne sait pour le moment si les bellicistes américains qui remplissent les écrans de CNN seront suivis et s’ils pourront déclencher la nouvelle guerre de 2014 qu’ils appellent de tous leurs vœux.
Mais à entendre les récentes déclarations du président des chefs d’état-major américain Martin Dempsey : « L’armée américaine est prête à remplir ses obligations envers l’OTAN, si la crise en Ukraine nécessite cela » En clair, le général a également ajouté que, à son avis, si l’on permet la Russie d’envahir un Etat souverain sous le prétexte de protéger les personnes d’origine russe en Ukraine, toute l’Europe de l’Est et les Balkans seraient sous la menace de déstabilisation.
Quelle fausse dévotion !
Chérif Abdedaïm, http://lnr-dz.com/index.php?
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